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38° 45' 02" N
41° 20' 25" E
Սուրբ Յովհաննու կամ Եղրդուտի վանք

Le Monastère de Saint-Jean ou de l’Oseraie

(Sourp Hovhannou Vank‘ ou Éghërtoudi Vank‘)
Le Monastère de Saint-Jean ou de l’Oseraie
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Le monastère de Saint-Jean est situé dans le canton arménien de Darôn – la Taronide – à quelque 1950 m d’altitude, à l’ouest de Mouch [Muş] et en bordure du massif du Sassoun, sur les hauteurs boisées de la montagne de Sim, ou Sev Sar [Karakaş Dağ], à *** N et *** E. Il doit son nom à la tradition qui, au IVe siècle, conduit en ces lieux saint Grégoire l’Illuminateur, chargé des reliques de saint Jean Baptiste et de saint Athénogène, pour en faire la double offrande aux monastères du Saint-Précurseur (n° 53) et de Saint-Jean. Ceux-ci se font vis-à-vis, édifiés des deux côtés nord et sud de la vallée de l’Euphrate oriental ou Aradzani [Murad Çay] où s’étend la plaine de Mouch, répondant en réalité à une même dédicace : le saint précurseur du Christ, Jean Baptiste.

Aux temps apostoliques, ces lieux auraient aussi été gratifiés d’un flacon d’huile sainte déposé au milieu de certains osiers et retrouvé plus tard au pied de l’un d’eux près d’une source. Cet arbre toujours vert, d’une variété rare, protégé par un enclos jouxtant une chapelle et vénéré des pèlerins, ou encore le bosquet dont il a fait partie, ont donné leur nom, Éghërti « osier, saule », ou Éghërtoud « oseraie », au monastère de Saint-Jean où, de son côté, l’antique flacon a trouvé place dans un précieux reliquaire. Un autre relique, le Saint-Signe des Aigles ou Déposé par l’Aigle (Ardzwaper Sourp Nëchan), un fragment du bois de la Croix, l’a pareillement désigné. La date de fondation d’aucune des trois église du monastère n’est connue, mais l’on a supposé que celle de Saint-Jean, qui se présente comme une mononef à voûte en berceau, était la plus ancienne, voire le premier martyrium édifié près de l’osier par saint Grégoire. Les deux autres, dédiées à saint Étienne et à la sainte Mère de Dieu, pourraient typologiquement être attribuées au X-XIIe siècles. Une stèle à croix servant de pied-droit ou de linteau à l’entrée d’une chambre latérale de l’église Saint-Étienne portait la date de 1153.

Connu du grand docteur Jean-Vanagan (Hovhannès Vanagan, † 1251), le monastère est cité dans une bulle de 1445 du catholicos Grégoire X de Magou (Krikor Magwétsi), second titulaire du siège renouvelé d’Édchmiadzin, à Vagharchabad (v. n° 7, 9). Dans les années qui suivent, aux jours de l’archevêque Jean (Hovhannès, † apr. 1466) et jusqu’à la fin du XVIIe siècle, un scriptorium fonctionne au sein de la communauté. Saint-Jean est alors aussi une école musicale, et une tradition de chant sacré semble s’y être maintenue jusqu’au début du XXe siècle. Le monastère est très actif au début du XVIe siècle : Grégoire de Darôn (Krikor Darôntsi), dont la présence est également signalée au Saint-Précurseur de Mouch et à Saint-Jacques de Nisibe (n° 46), achève en 1511 d’y restaurer le narthex de l’église Saint-Jean ; le copiste et poète Garabed de Paghèch [Bitlis] (Garabed Paghichétsi), y séjourne en 1513, avant de passer au Saint Précurseur puis de rejoindre non loin la communauté des Saints-Apôtres dont il deviendra plus tard le supérieur (n° 54). Un autre Grégoire, dit de Mouch (Krikor Mchétsi), nommé abbé par le catholicos Philippe Ier d’Aghpag (P‘ilibbos Aghpaguétsi, 1633-1655), restaurera un tambour et les toits : probablement faut-il lui attribuer l’édification, dans le ressort du monastère, de l’église de la Mère de Dieu de Sëndzënoud [***] en 1654.

Sous l’abbatiat de Pierre (Bédros), des travaux plus importants, touchant les trois églises et l’enceinte nord, sont financés et réalisés en 1707 par le moine Serge (Sarkis). L’église de la Mère de Dieu est à nouveau restaurée en 1809, tandis qu’en 1828 le supérieur Ghazar et l’architecte Boghos Kalfa édifient au nord du narthex de Saint-Jean un porche surmonté d’un clocher à rotonde. Une école, qui servira aussi d’orphelinat, s’ouvre vers le milieu du XIXe siècle dans les bâtiments conventuels. En 1866 le monastère est frappé par un tremblement de terre qui fragilise la coupole de l’église Saint-Étienne, mais surtout, deux ans plus tard, il est attaqué et pillé par les Kurdes. En ruinant de nombreux villages arméniens de sa juridiction, les massacres de 1894-1895 achèveront de dégrader la situation matérielle du monastère. En 1906, celui-ci avait pour supérieur le P. Arakel Mouradian, vicaire du primat de Mouch.

Le monastère de Saint-Jean ou de l’Oseraie comprend :

• L’église Saint-Jean (Sourp Hovhannès), mononef à voûte en berceau et toit en bâtière d’environ 7,5´5 m. Considérée comme la plus ancienne et abritant les reliques de saint Jean et de saint Athénogène, cet édifice avait d’abord reçu une couverture en tables de plomb.

• Accolée à la façade sud de Saint-Jean, l’église de la Sainte-Mère de Dieu (Sourp Asdwadzadzin), édifice en croix inscrite à tambour et coiffe pyramidale. De part et d’autre de l’abside, deux absidioles sont surmontées de chambres latérales ; des chambres à deux niveaux occupent également les angles opposés.

• Accolée à la façade sud de la précédente, l’église Saint-Étienne (Sourp Sdép‘anos), de 7,6´6,9 m, plus élevée mais de plan identique. Elle était décorée d’un baldaquin d’autel finement ouvragé.

• Prolongeant l’église Saint-Jean d’environ 8,5 m vers l’ouest, un narthex reposant sur quatre piliers de section circulaire, restauré en 1511. Ouvert au nord, il était doté d’un portail décoré d’un un bel assemblage de pierres polychromes probablement réalisé à cette occasion.

• Prolongeant d’une même longueur vers l’ouest les deux églises de la Sainte-Mère de Dieu et de Saint-Étienne, un second narthex communiquant avec le précédent.

• Sur la façade nord du narthex de l’église Saint-Jean, un porche-clocher à trois niveaux et rotonde d’environ 25 m2 d’emprise édifié en 1828.

• Une enceinte, élargie en direction du nord-ouest au début du XVIIIe siècle, à laquelle sont adossés sur deux niveaux la prélature, les logis, l’économat, le four, l’école et les écuries.

• À l’arrière des trois chevets et hors des murs, le cimetière des moines.

• Du même côté, la chapelle Saint-Georges (Sourp Kévork), effondrée avant la Grande Guerre, et près d’elle, l’enclos de l’arbre Éghërti.

• Hors des murs, à l’est, des bergeries.

Grand lieu de pèlerinage, le monastère de Saint-Jean possédait de vastes bois, pâturages et terres arables, notamment en lisière de plaine autour de Guialakhôl [***] et Blèl [Bilir], où se trouvait sa ferme avec granges et moulin à huile, et en montagne à Dadrakom [***] et Avazhogh [***]. À l’époque d’Abdul-Hamid II, la partie sud-est de ses domaines, en Sassoun, avait été confisquée par le gouvernement turc, qui y avait installé des Kurdes. La juridiction du monastère, décrite en 1588 dans un texte intégré à celui de la bulle de Grégoire X (1445), allait, à main gauche de l’Euphrate oriental, de Guindj [***], situé à l’extrémité occidentale de la plaine de Mouch, jusqu’à Khoronk‘[***] et K‘artzor [***], tandis qu’au sud et au sud-ouest, il englobait plusieurs districts montagneux du Sassoun, comme Dalworig [***], Khoulp‘ [***] et Khian [***], s’étendant en contrebas jusqu’à Hazro [***], Silvan [***] et Lëdjé [***], au nord-est de Dikranaguerd [Diyarbakır].

Saccagé puis confisqué après la Grande Guerre, le monastère de Saint-Jean a été laissé à l’abandon avant d’être systématiquement démoli. Au début des années 1980 il n’en restait qu’un morceau d’enceinte et quelques bases de murs à l’emplacement du porche et de l’église Saint-Étienne. De sa collection de 34 manuscrits anciens, datés de 1177 à 1858, rien n’a survécu. Rien, non plus, des reliques, hormis une reliquaire de saint Cyriaque reçu en 1754, qui a rejoint à Jérusalem le trésor du couvent de Saint-Jacques.

Akinian, 1952, 574-581. Oskian, 1953, 91-129. Mouradian & Mardirossian, 1967, 218-219. Thierry, 1983, 398-406. Der Garabédian, 2003, 68-90, 141-146. A. To, 1912, 106, 117-118.

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